logo dma DÉFENSE DES
MILIEUX AQUATIQUES

Pêcheurs amateurs / pêcheurs professionnels : mais quelle est la différence ?

Nous vous parlons très souvent de la pêche professionnelle en eau douce, mais il existe une 2ème catégorie beaucoup moins connue, voire même ignorée par beaucoup, mais dont l’impact réel est peut être au moins aussi important : les pêcheurs amateurs aux engins et aux filets (PAEF).

Qui sont-ils exactement ? Comme les pêcheurs de loisir à la ligne, ils sont représentés au sein de la FNPF et prennent part aux décisions du réseau associatif des pêcheurs récréatifs. Leur cotisation est dérisoirement faible : seulement 34€ par an pour le département de la Gironde (en plus du prix de la carte de pêche). La grosse différence, c’est que ces pêcheurs utilisent des engins et des filets, comme le laisse supposer leur dénomination.

Ils étaient environ 8.000 en France en 2015, soit 20 fois plus nombreux que les pêcheurs professionnels. Ils sont répartis de manière assez hétérogène sur le territoire, avec une grosse concentration sur les départements de la Gironde et de la Dordogne, avec plus de 1.600 pêcheurs amateurs aux engins licenciés en 2019 pour un peu plus de 2.000 licences disponibles.

Comme beaucoup, vous pensez sans doute au retraité qui pose 2 nasses à anguilles à l’occasion, histoire d’avoir du poisson à manger le soir ? Mais la réalité est bien différente ! Voici pour votre édification la liste des engins autorisés pour les titulaires de ces licences, liste variable en fonction des départements. Ici l’exemple de la Gironde, le pire département en la matière, pour lequel il existe 4 types de licences : - Licence «filet dérivant amateur» : 1 filet dérivant de 60m de long et 6m de haut, 1 carrelet de 25m2 et 6 balances. - Licence «petite pêche bateau» : 3 nasses à anguilles, 6 nasses à lamproies, 3 nasses à poissons dont silure, 3 lignes de fond (ou cordeaux) avec un maximum de 18 hameçons au total, 1 carrelet de 25m2, 6 balances. - Licence «anguille» : 3 nasses à anguilles, 3 lignes de fond (ou cordeaux) avec un maximum de 18 hameçons au total, 6 balances. - Licence «carrelet» : 1 carrelet fixe de 25m2, 6 balances.

Pour le département de la Gironde, il y a le nombre ahurissant de 1.453 licenciés en 2019 pour 1.860 licences disponibles : - 151 licences «filet dérivant amateur», - 392 licences «petite pêche bateau», - 77 licences «anguille» - 1.240 licences «carrelet».

Donc, en faisant un simple calcul, on arrive aux chiffres maximum de 9.060 mètres de filets dérivants, 1.407 nasses à anguille, 2.352 nasses à lamproie, 1.176 nasses à poissons divers dont le silure, 8.442 hameçons en ligne de fond, 1.860 carrelets et 11.160 balances (chiffres calculés ici sur le nombre de licences disponibles, car nous n’avons pas le détail des licences pour les 1.453 licenciés en 2019).

Voici maintenant l’exemple du département de la Dordogne, histoire de voir ce qui attend les poissons qui ont surmonté tous les pièges de l'estuaire de la Gironde : - 2 filets de type araignée d’une longueur maximale cumulée de 20m à mailles de 27mm ou plus ; - 1 filet de type araignée d’une longueur maximale de 10m à mailles de 10 ou 12mm. - 2 nasses à mailles de 27mm ou plus ; - 3 nasses anguillères à mailles de 10mm ou plus ; - 1 à 3 lignes de fond ou cordeaux ne totalisant pas plus de 18 hameçons simples.

Sur le seul département de la Dordogne il y a 157 pêcheurs amateurs aux engins licenciés (pour 284 licences disponibles), ce qui peut représenter un total de 4.710m de filets, 314 nasses, 471 nasses à anguilles et 2.826 hameçons sur ligne de fond ou cordeaux.

Au vu des engins qu’ils peuvent utiliser, il saut aux yeux que le côté amateur de «l’histoire» est bien moins évident ! En tout cas il est clair qu’il y a de quoi remplir très (trop) vite un congélateur, surtout au vu du matériel utilisé par certains : motorisation puissante équipant des barques en aluminium de 6m équipées bien souvent d'un treuil parfois électrique, mise à l’eau privée avec circuit de balisage etc…. La confusion avec un équipement professionnel est garantie pour le touriste de passage ou le pêcheur récréatif lorsqu'il croise ces engins sur les bord de la Garonne et de la Dordogne… Bien entendu, ces pêcheurs, comme tout «amateur», n’ont absolument pas le droit de vendre le poisson capturé.

Le point commun avec les professionnels, c’est qu’ils ont l’obligation de déclarer à chaque sortie leurs captures dans des carnets, données ensuite collectées par l’OFB, exactement comme pour les professionnels par conséquent, il faut le redire.

Et là l’histoire se complique énormément, car tous les indicateurs montrent un taux de déclaration désastreusement faible. Pour exemple : seulement 1.306 pêcheurs amateurs aux engins ont déclaré des prises en 2013, soit à peine 16% de l’effectif…

Pourtant leur impact est très loin d’être anodin, et les quelques données disponibles montrent déjà un impact fort. Alors, imaginons l’impact réel en comptant toutes les captures non déclarées.

Il suffit de voir les embarcations utilisées, quotidiennement pour beaucoup, pour vite comprendre que certains sont bien plus proches du professionnel dissimulé que de l’amateur. Alors, que font-ils de tout le poisson pêché ?

La vente directe aux particuliers ou aux professionnels (de la restauration notamment) est peut être un début d’explication ? Pour information, la vente illégale de poisson par un amateur peut être punie d’une amende de 3.750€. Il en est de même pour l’acheteur...

Soyez donc très vigilants ! Nous vous invitons d’ailleurs à nous informer si vous étiez confrontés à ce genre de dérive.

Comment peut-on encore tolérer et expliquer que des amateurs manipulent des engins qui devraient être réservé aux professionnels ?... La tradition ?... Dans bien des cas, le matériel utilisé est bien loin de ce fameux aspect «traditionnel», défendu becs et ongles par les associations représentant ces pêcheurs. Nous vous joignons quelques photos d’embarcations «traditionnelles» appartenant à des pêcheurs amateurs aux engins.

Ce qui est certain, c’est que l'ensemble du cheptel piscicole en fait lourdement les frais, les espèces migratrices en tête…


Sur le même thème